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Epicurisme autour des coquillettes au comté et jambon truffé

Julien Fournier

Les fraîches températures du moment ont des vertus sanitaires, mettant en sommeil les microbes ambiants, pouvant faire penser que contrairement aux poireaux masculins, le froid allonge la vitalité vigoureusement. Aussi, elles nous permettent de fumer du bec dès le matin comme un bon vieux diesel, sans pour autant inhaler de la nicotine en sortant les poubelles. Mais elles m’accordent surtout le droit de m’en mettre à ras bord, afin de réchauffer mon corps de coquelet. Les dents même pas encore brossées donnant ce goût de la veille que mon esprit est déjà dans la gamelle de la journée. Que vais-je bien avaler pour me réchauffer ? Quel aliment dansera sous ma dent pour me dégeler ? Un brainstorming doit obligatoirement s’installer avec mon agnelle de lait afin d’éclaircir un avenir que mon estomac espère être désir. Je vais d’ailleurs vous faire une confidence, j’ai entendu en me versant dans mon bol une poignée de Crunch que le ventre de ma gredine gargouillait à réveiller un narcoleptique. A mon avis, on évite déjà le Brunch ! La vie est magnifique.

Lorsque deux ventres parlent le même langage, la négociation est aussi complaisante que pour un baron le blanchissage. Elle voulait croûter franchement, et j’étais soupirant d’un festin consistant. Mes chicots toujours pas lotionnés que face à moi on venait me parler de fromage fondu ! Remarquez, l’économie de dentifrice ne sera jamais perdue. Apparemment, le Mont d’Or que ma femme avait pisté allait de se faire boulotter despotiquement le midi… Allez feu la pitance, nous nous sommes mis d’accord sur un nouveau petit bistrot qui ravira nos sens. J’avais en plus la promesse de ma déesse que la carte allait me faire chavirer tel le Costa Concordia jadis l’avait fait.

Ma crapule ne m’avait pas menti, tant la lecture de ma mi-journée aurait pu faire raidir un asexué. Mon œil droit fixait dangereusement l’os à moelle, tandis que le coquin de gauche, je ne parle pas de Dominique, se calquait sur la plâtrée de coquillettes au comté. Au milieu, mon tarin donnait la direction des croquettes au chorizo, comme pour nous passer le message de se dépêcher avant qu’elles nous passent sous le nez. Autant je ne sais pas pour qui je vais bourrer l’urne en Avril, autant j’ai connaissance de ce que je vais mettre sous mon nombril. Lorsque la serveuse venait prendre notre commande, elle s’exclamait après notre déposition que nous devions avoir faim. Disons simplement que si nos fions épousent les banquettes d’un troquet, ce n’est pas parce que nous avons envie de prendre un avion. Enfin, passons.

Les boules de bonheur dorées ingérées en entrée, me voici le museau enfermé dans la chaleur de ma copieuse courtisane. Le mélange d’odeurs du Jura, combiné à celle du jambon truffé me fait fondre comme neige au soleil, m’indiquant tout simplement que j’avais à faire à une proposition pyromane. Me voilà entrain de godailler ses minis féculents avec cadence, lorsque je m’apercevais que ma compagne n’adhérait en rien à ma danse. Vous avez déjà essayé de faire croire à une Italienne que les coquillettes étaient des pâtes ? Autant de suite essayer de prouver également que la terre est plate ! L’avertissement était clair, je devais en profiter car à la maison la tolérance serait zéro pour ses petites encoches cuites dans l’eau. Mais diable, que mon moment était quand même gourmand.

Le comté était aussi filant qu’une étoile, me faisant croire que je pouvais faire le vœu de venir le courtiser en Franche-Comté. Bon, je ne suis tout de même pas cinglé pour me les geler à Montbéliard pour le plaisir du hasard. Je préférais me concentrer sur les beaux morceaux de jambon blanc truffés, sorte de radeaux flottant dans cette marre crémeuse, et donnant envie d’y naviguer dessus de façon décideuse. Je ne vous cache pas non plus la richesse de ce plat que je venais de finir de ce pas. Après ça, le café gourmand est le plus gros péché que le catholicisme ait connu. Cela tombe bien, je suis aussi croyant que Cahuzac est sincère. Et ça, je vous le jure.

– « Madame, s’il vous plait… »

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