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Epicurisme autour de l’araignée de mer

Julien Fournier

Mes petites rascasses, il y a une journée épique que je comptais vous conter, même si des bribes ont été oubliées. C’était le genre de rendez-vous qui vous donnait soif d’eau la nuit suivante, et une brume légère le lendemain de l’étape abondante. Pour être tout à fait honnête, en boutonnant ma chemise le matin de mon destin, je savais que je me dirigeais vers un futur mal de tête. Mais je n’oubliais pas que du Doliprane garnissait mon tiroir sous la machine à café, et surtout que j’aimais me fourrer dans des pièges prémédités. Mes juteux brugnons, enfilons nos pantoufles de ville, et allons-nous-en satisfaire tel un employé d’un CGR devant un cinéphile.

Nous étions vendredi, et j’avais l’ordre de me pointer chez mes parents sur les coups de onze heures et demie. Il ne faut jamais plaisanter avec une convocation à l’apéritif ! À la rigueur celle au baccalauréat est optionnelle, mais ici, nous parlons d’un devoir passionnel. À peine la porte poussée, que j’entendais un individu que je connais bien s’exclamer du bienfait de son premier blanc frais. Le sapajou n’avait même pas lacé ses souliers, qu’il souhaitait déjà s’abreuver. Comme dirait mon ami marionnettiste, les marottes sont cuites. Rentrons dans l’automobile, et jouissons du moment qui se profile.

Diable, le vin blanc pétillant ruisselait depuis maintenant une heure le long de mes parois intérieures, lorsque la faim commençait à me creuser par bonheur. Ce que vous ne saviez pas mes loutres à courtes pattes, c’est que nous avions un objectif aussi concret que celui d’un gérant de friterie devant une patate. Nous allions ce vendredi-là suçoter avec un jovial air des pinces d’araignées de mer. Je ne sais pas si vous avez déjà liché cette espèce de crabe, mais pour moi c’était une grande première. Évidemment, pour que cela soit plus marrant, je m’étais vêtu d’un t-shirt blanc qui se languissait de se faire maculer par le jus gourmand. Mazette, pince à la main, me voici devant l’animal marin, sans aucune intention de faire le malin.

Saviez-vous que la bougresse à carapace rouge orangé atteignait sa maturité sexuelle à l’âge de deux ans ? Nous, prédateurs aquatiques d’un jour, ne nous posions pas de question en amorçant des fouilles minutieuses dans chaque entraille de notre mangeaille. Heureusement, nos prospections avaient plus de succès que celles qui n’ont toujours pas permise de retrouver M. de Ligonnès, le terrassier nantais. Je découvrais au fur et à mesure de la mâchouille, une chair fine et délicate, rendant nos palais aussi soyeux que les poils d’un suricate. Ah, vous n’avez jamais caressé un suricate ? Comme prévu, je me faisais éclabousser par la marée, devant ma mère qui présumait du sort de mon tissu, à savoir tourner dans le tambour de l’amour à son insu. Inutile de vous narrer que pendant ces péripéties-là, le cidre s’évaporait de nos verres avec une énorme facilité.

Quand nous sommes sortis de notre grotte nourrissante, à dix-huit heures pétantes, je vous mentirais si je vous disais que la faim nous envahissait. L’avantage de ces réunions de famille étroite, réside dans la façon de faire corps face à l’adversité. Il pleuvait, nous étions imbibés comme une éponge après une partie endiablée de vaisselle, mais nous faisions qu’un pour savoir que la vie est belle. Merci pour ce moment.

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