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Epicurisme autour de l’os à moelle

Julien Fournier

Il y a des rendez-vous que l’on pensait évidents, des destins que l’on considérait se croiser irrésistiblement. La cécité devant une situation que l’on pensait basculer dans le vrai, et un obstacle certain dans l’éclaircissement d’instables lendemains. Il est acté, que nous ne maîtrisons pas toutes les données de nos velléités, hormis à table, où la déception ne peut qu’être individuelle, devant un mauvais choix de taverne ou d’écuelle. S’en vouloir à soi peut être un sport quotidien, pour des femmes et hommes en manque d’espérance, telle une pluie sans indien. Mes vermisseaux, pas de désarroi, nous nous approchons ce midi d’une table de joie.

Les véritables rencards, n’ont pas pour but de nous laisser hagards. Au contraire, l’excitation précède constamment une réelle et sincère satisfaction. Dans ces cas-là, retrouver autrui, s’apparente à une belle et pure ambition. Imaginez un éleveur de cochons retrouvant sa plus belle truie ! Je n’étais pas ce midi-là engraisseur de gorets, et mon meilleur ami ne correspondait en rien à une bête à groin. Mais, je savais pourquoi nous marchions sur un sentier commun. L’amitié mes espiègles truites, la vraie, pas la fausse journalière, est une denrée aussi rare que l’optimisme devant la fonte glacière. Nous étions à notre quatrième rouge, quand l’aubergiste nous appelait pour gobichonner de ce pas. À table !

Lorsque je lorgnais d’un œil pesant sur la carte de ce restaurant, le goût de la certitude revenait comme s’il ne m’avait jamais quitté. Os à moelle était ce que ma rétine avait épousé, sur la première ligne de ma future histoire enchantée. D’ailleurs, je me demandais à ce moment-là, pourquoi je n’avais jamais posé quelques mots sur ce que je considérais comme meilleur. Ne m’en voulez pas mes biches égarées, on y est ! Lorsque je m’apprête à lécher les rigoles grassouillettes, j’ai pour habitude de vouloir jouer le chat, dans ces gouttières douillettes. Dorée au four, l’os ne nous donnait aucun consensus possible devant son désir bestial de se faire ripailler avec amour. Cela tombait à pic, tant j’aspirais à honorer ce classique bistrotier.

Un os à moelle s’accompagne obligatoirement de pain grillé, si possible au beurre d’escargot. Sans miche croustillante, le sel de ce mets est aussi absent que sur une morue trop dessalée. La moelle, elle, mérite son divan croquant pour s’offrir à nos becs plus posément. Oublions l’aspect déplaisant des bruits de bouche, en les faisant passer pour une symphonie peu farouche. Mazette mon ami, je ne sais pas si tu te régales, mais Dieu sait que je fais du bruit ! J’étais tellement en jouissance culinaire, que je tentais une accolade à l’aide de mes boudoirs aussi brillant qu’un cuivre après astiquage. Ravisons-nous, la tache de gras n’allait pas lui plaire. Bref, il était temps de tourner cette page, et d’accueillir l’escalope divine, avec la motivation d’un cheminot sifflant dans une gare ferroviaire. Deux minutes d’arêtes pour mon compagnon, qui avait pris du poisson.

Que la pitance est réparatrice devant l’artifice. Le frère que je n’ai jamais eu, me connaissant avec mes exaltations et mes tourments, savait qu’en trébuchant sur de la moelle, je ne tomberai pas sur un os. Le sacripant jouait délicieusement la partition de l’authenticité, que j’aimais recevoir entre deux bouchées. Merci pour ce moment.

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