Ma douceur italienne a eu la riche idée d’anticiper ce jour la gamelle qui sera amour pour tous les cochons comme moi durant les trois prochains mois. Sortant de la douche lustré comme une casserole en cuivre, mes naseaux ont été interpellés par une douce odeur me rappelant ce qu’est la tentation. Encore dans le plus simple appareil, je n’avais guère d’autre solution que d’aller au front en espérant que ma chenapine ne confonde pas le poivrier avec ma pine. Je découvrais devant moi ma diablesse entrain de cisailler du reblochon avec un air polisson que j’affectionnais tellement. Lorsqu’elle a cette conviction, la future écuelle est automatiquement un enchantement. Il était temps pour ma pomme d’aller m’habiller car ce midi, ce n’est pas moi qui allais enfourner.
Alors bien sûr, un Savoyard aurait à l’évidence à redire sur la préparation de la délectation fromagère, mais posons-nous plutôt la question s’il est obligatoire d’aimer la mamelle pour épouser une bergère ? La liberté et la fraternité sont en cuisine des termes essentiels, malgré que l’égalité soit assurément sujette à chaque région et ses ficelles. Le plat était ici tapissé d’un paillasson de pommes de terre, disposées de façon si méticuleuses que je reconnaissais déjà la patte de ma bienheureuse. La bouteille de blanc était sortie du frigidaire pour annoncer la future saucée qui allait me plaire. Et tout ça alors que ma divine secouait en même temps le manche de la poêle, qui renfermait ces tétons de cochon gorgés de gras… « Diable mon père, lardonnez-moi. »
29 septembre 2024