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Epicurisme autour de la salade composée

Julien Fournier

L’autre jour, le vent du sud balayait la végétation basque de sa douceur. Le thermomètre léchait alors les vingt-sept degrés à l’approche du souper. Ce n’était pas vraiment un temps à se farcir un pot-au-feu, ni une atmosphère à se godailler un chili con carne. Même si ma capacité à encaisser de la lourdeur en pleine chaleur n’est plus à prouver, j’avais ce soir-là envie de légèreté. En effet, je venais à peine de conclure un week-end caloriquement extrême, passé avec mes amis les plus béquillards. Attention, je n’ai jamais dit que c’était des gros lards ! Bref, je me voyais bien m’avancer vers un coucher aéré, et non encore flatuler jusqu’à faire boucher le tarin du marchand de sable. En quelque sorte avec lui, je souhaitais être aimable.

J’avais néanmoins une crainte, dînant chez mes parents. Étant comme vous le savez fils unique d’une mère juive qui n’est pas juive, je redoutais de tomber nez à nez avec un restaurant entier de viandes, de charcuteries, de fromages, et de « Je t’ai fais une crème brûlée en plus pour te faire plaisir. » Je n’étais tout simplement pas disposé à ce moment là à faire baigner mes dents dans un océan d’opulence. La bonne surprise arrivait lorsque celle qui m’a mis au monde m’annonçait la confection d’une salade composée. Oui vous entendez bien, j’étais ravi de jouer le bovin pour ruminer de la pelouse comme jamais.

Tout de même, quelques interrogations me venaient quand la vision de la paillasse s’éclairait. Il y avait disséminés sur le plan de travail, des croûtons aillés qui promettaient une haleine de poney, un gros morceau de thon à faire triquer des hommes de mauvais goût, une quantité de maïs à émouvoir un cartel de mexicains, des œufs durs aussi lisses que les valseuses d’un habitant de Mykonos, et enfin quelques tomates qui rendraient fier n’importe quel maraîcher. Le problème étant le suivant, je n’avais aucune feuille de laitue à portée de rétine, me faisant craindre un buffet froid dans un bol en guise de supposer douceur estivale. J’espérais juste que ma mère ne m’avait pas raconté de salades ! Me voilà attablé, ma truffe en direction de l’assiette de chorizo que mon père lorgnait également comme un gros veau. Mon fion de volaille épousait parfaitement la chaise confortable, qui m’empêchait de pécher en allant à la charcutaille. Je restais donc sagement assis, en attendant l’arrivée de la proposition annoncée.

La voici ! Les contenants noirs ne laissaient filtrer aucun indice de la malice que nous allions croûter. La salade était forcement élégante dans ces sombres écrins, nous laissant présager d’un défilé buccal de haut festin. Alors que la gamelle se présentait devant mon museau, sa description n’était autre que générosité. C’est simple, la salade était comme Anne Hidalgo, invisible sous le poids des responsabilités. On n’y voyait pas une brindille de verdure ! Remarquez, je dois vous confesser que je n’étais pas dans une puissante détresse devant la non-perception du feuillage léger. Mon instinct de petit coquin a vite pris le dessus, dès lors que je fixais avec désir les dés ailés qui jalonnaient mon repas plaisir. La mâche était goûteuse et ma sacoche, heureuse.

Ma faim commençait à être totalement comblée alors que difficilement, j’arrivais au bout de mon récipient. Si l’on m’avait dit qu’une salade allait un jour me rassasier, j’aurai sûrement ri bêtement, car je ne connaissais pas encore le pouvoir de la salade de maman.

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