Menu
Retrouve moi aussi sur

Votre plume gourmande

Edit Template

Epicurisme autour du couscous

Julien Fournier

Il y a des périodes où l’instabilité est aussi présente qu’une araignée sur une toile. Il est notable qu’à l’heure actuelle, les fondations du monde sont aussi fragiles que les chevilles d’une danseuse étoile. Les peuples et civilisations, en manque de ponts en direction de la solidarité rêvée, devraient faire de la culture leur arme de construction active. Et Dieu sait, enfin Allah sait, enfin on s’en fiche après tout, que la cuisine du monde est une offensive épicée qui adoucit les communautés. Croiser un enfant de la Rue des Rosiers dégustant un tajine est aussi beau qu’un coucher de soleil, lui-même grandiose tel un chenapan de la Medina savourerait la coquine Babka. Il n’y aurait qu’un dénominateur commun qui s’appellerait le festin. Évidemment, l’utopie de ces quelques lignes ne ferait même pas avancer un escargot enrhumé vers une laitue lavée, mais je tenais tout de même à vous imager mon souper de mardi dernier. On le nommait couscous, et ce voyage procurait quelques secousses.

Il n’est pas devenu un des plats préférés des Français pour rien, tant ses saveurs et ses odeurs nous offrent une escapade vers un soleil faisant du bien. Il est nourrissant, réconfortant, pouvant être piquant, et bien souvent se partage lors d’un excellent moment. Se réunir pour bouloter ce mets sans frontière, est la joyeuse garantie de s’accorder un rendez-vous de répit. Certes, il fera soif à la sortie de table et cela tombe bien, car admirer un couscous devant soi est déjà voir le verre de son destin à moitié plein. De plus, le couscous est un des plus beaux traits d’union monothéiste, de par son emblème dans la cuisine aussi bien maghrébine que juive d’Afrique du Nord. Rien que pour cela, nous avions envie de nous diriger vers la conciliation et son corridor.

L’initiative avait été prise par un ami me voulant du bien, de jouir d’une croûte que l’on ne consomme jamais pour rien. Le lundi soir serait alors notre rendez-vous, pour exposer nos peines, en cajolant nos bedaines. L’auberge orientale se trouvait à deux pas de mon paillasson, et pourtant je n’y mettais les babouches que trop rarement. Néanmoins, j’étais certain que la réparation de cette erreur éviterait des prochaines frustrations. Rien que la pensée tournée vers ce plat datant de l’Antiquité, et me voici transporté dans des sphères goûteuses et heureuses. Et si l’origine du couscous, qui serait plus berbère qu’arabe, fait débat, la certitude demeure qu’il est né au Moyen Âge. Mais surtout qu’il allait ce soir nous mettre de désir en age.

Lorsque l’on relate cet étendard d’un monde que l’on a juste devant soi, on se penche fatalement sur la diversité de sa composition. Encore une histoire de multiplicité, qui dans ce monde aux abois, est une somptuosité. Maroc, Algérie, Tunisie, Libye, Égypte, variantes levantines, chaque couscoussier renferme le caractère géographique de son propriétaire. Je ne m’avancerai pas ici à vous annoncer le côté traditionnel de mon souper, la modestie me fuirait en s’échappant par la porte de derrière. Pouvant juste affirmer que nous venions d’atterrir dans une enclave marocaine, il était temps pour nous d’entamer la merguez souveraine.

Mazette, nous nous sentions à l’aise, avec dans nos becs la semoule de blé dur préparée à l’huile d’olive. Si nous nous avancions vers un peu de caricature que j’aime tant, nous pourrions entendre le muezzin nous chanter le beau temps. Et si en plus l’on se dit que le couscous est un trésor de bienfaits pour la santé grâce à sa valeur nutritive, alors vivement que son statut patrimonial à l’Unesco participe à éteindre notre planète abrasive.
Chroniques épicuriennes

Ton espace de convivialité

NAVIGATION

Liens Légaux

Retrouve moi sur

Site réalisé par Aranea