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Epicurisme autour de la blanquette de veau

Julien Fournier

Il est inutile d’être un cocardier chevronné pour ne pas laisser une blanquette faire banquette. Les beaux jours arrivent à grand pas, l’occasion de faire entrer en jeu ce grand plat. Contrairement aux humains depuis la loi Évin, le veau a le droit de fumer dans les moindres recoins. Même pour cela, nous le regardons avec émoi, tant ce patrimoine tricolore est rassurant quand nous l’avons en décor. La chaleur qu’il dégage et l’odeur qu’il partage en fait une caresse, que nous aimons recevoir, avec joie et non tristesse. La confection de cette traditionnelle friandise, se doit d’être tout sauf une surprise. Le progressisme a des limites quand il s’agit de s’attaquer à un mythe.

Partager un bout de France, c’est ressentir le poids de l’Histoire au bout de son trident. En ressortir avec un bout de carotte entre les dents, c’est le minimum que nous puissions faire avec consentement. Si jadis nos regrettés anciens avaient la baïonnette facile, de nos jours, nous avons la blanquette docile. Bien avant la diversité, nous étions riches de notre manger. Et cela, un sapajou d’ami l’avait bien compris, en commandant ce fleuron du bon. Si le diablotin a des cuisses aussi épaisses que la charpente d’une ancienne forteresse, il a surtout la gourmandise d’un maître saucier devant une béarnaise avec un équilibre parfait. J’étais en effet certain, que le bougre qui m’accompagnait à la gamelle n’allait pas se faire prier pour cajoler l’écuelle. L’heure était arrivée pour nous de déboutonner nos pantalons, et de montrer au veau notre sincère affection.

Cette étrenne culinaire ne peut qu’être mitonnée que par un passionné. Et même si ce dernier est de mauvais poil, la rudesse de son esprit s’arrondira avec la tendresse de l’animal. Mon compère et moi ne prenions aucun risque sur la qualité du broutard, mijoté avec la douceur d’une balinaise côtoyant un malicieux routard. Nos estomacs étaient chauffés à blanc, malgré le fait qu’un petit rouge bien ficelé accompagnait mieux notre moment. Que dire devant ces blanquettes de veau, hormis qu’elles avaient le pouvoir de rassasier un quartier entier de Saint-Malo. Une vague olfactive nous submergeait alors de désir, et piquait nos sens tel un clou chatouillerait un fakir. Diable, que faisons-nous ici mon ami, si ce n’est jouir de la vie !

Nos pièces de veau de lait, découpées astucieusement en morceaux faciles à ingérer, fondaient sous la langue comme un suppositoire se consumerait dans un fessier. La sublime sauce, liée d’amitié avec les jaunes d’œuf, veloutait nos palais avec l’entrain d’un portugais enduisant des murs neufs. Carottes et champignons prenaient toute leur place dans ce marécage vertueux, qui rendait les âmes guillerettes et les corps chanceux. Chaque cuillerée s’apparentait à une plongée géniale, dans le monde merveilleux de l’héritage culturel hexagonal. Je ne me permettrais pas de dire qu’un veau bâfrait en face de moi puisque je l’avais dans l’assiette, mais le zouave avait tout de même un coup de mâchouille digne d’une poule devant des miettes.

Nos choix judicieux, combinés à la trempe du maître queux, avaient fait de notre rendez-vous gourmand un instant d’épicurisme florissant. Hormis pour les allergiques au pollen, l’arrivée du printemps est une aubaine pour les futurs déjeuners en terrasse, délaissant le cuir des banquettes, mais jamais la saveur d’une blanquette.

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