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Epicurisme autour de la belle côte de cochon

Julien Fournier

L’hexagone entier se fait une représentation idéalisée du village de Guéthary, notoriété de ce petit port oblige. Je ne parle pas de Depardieu, sinon j’aurai dit porc aguerri. Ce site côtier, délicieusement attrayant dans lequel l’air marin est vivifiant, éclipsait pendant longtemps le voisinage, pourtant complémentaire et non dérangeant. Bidart, là où je vous amène déjeuner, est un peu l’Arcachon du Cap-Ferret ou le Trouville de Deauville. Rien de péjoratif dans ma bouche, au contraire, lorsque vous comprendrez mes asticots qu’il y a de quoi se remplir le ventre à pleine louche. La place de village est vivante, de celles qui ne se réveillent pas uniquement en août mais dont l’agitation est omniprésente. Surtout, cet épicentre du bien-vivre est bordé de tables, avec tout de même des cuisines plus ou moins estimables. Nous étions un dimanche ensoleillé, et l’appel d’une auberge revigorante raisonnait comme celui d’un muezzin dans le médina de Tanger. Allons-y mes braves ouistitis !

La cavale du jour s’arrêtait dans un lieu où j’avais réservé en amont le droit à ce que l’on avale la pitance avec une faim de loup. En effet, j’étais déjà venu becqueter avec ardeur entre ces murs, sans la moindre torpeur. Connaissant donc mes quartiers, il était facile pour moi de guider mon invitée vers ce qui allait nous rassasier. Et lorsque l’on parlait de quantité mes élégants mulots, l’illustration arrivait in fine devant nos têtes de joyeux décérébrés. Dois-je vous préciser que mon dévolu n’avait pas été jeté sur un tian de légumes ou une tarte aux épinards, mais sur une friponne côte de cochon, aussi épaisse qu’une lanceuse de poids dans son falzar. Diable, rajoute-moi de la sauce au poivre vert jolie bistrotière !

La dernière bouchée de notre entrée à partager encore dans son loft buccal, que le morceau de viande apparaissait devant nos visages, interloqués par la grâce de l’animal. La bidoche, sûrement pudique, s’enveloppait confortement de son gras luisant. Dans un morceau comme celui-ci, la partie grassouillette n’est jamais là au hasard, mais bien pour que l’on lui fasse la fête. Vous savez ce que je pense des trieurs de saveurs dans ces cas-là… Hors de ma vue, ignorant scélérat ! Mazette, mais que voyait-on surplombant la vedette ? Nous distinguions bien une manifestation d’amidon, dans son contenant du bon. La frite, généreusement dorée, nous passait le message sur sa provenance « maison », et nous lui donnions en échange toute notre passion. Son aspect irrégulier faisait d’elle une divine sincère, que nous aspirions à baigner dans la piscine de poivre vert. Cela émeut le bout de la langue, comme me disait une ancienne amie.

L’heure d’entamer le dernier tiers de mon goret se profilait, et ma faim s’estompait comme des Chocapic dans du lait. Quel plaisir de croiser encore des adresses, où l’encombrement de l’assiette est une normalité assumée. Ressortir repu mais convaincu, partir plein mais sans tituber sur son chemin. Ne serait-ce pas là, la recette de l’ivresse des sens, celle de la satisfaction d’une gustative danse. Nous étions sur les coups de quatorze heures, et le ciel avait un point commun avec nos destins, il s’alourdissait. Heureusement qu’entre ma complice et moi, l’air était léger. Merci pour ce moment.
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